Où est l’Iran?
Dualité du mode de vie: » nomadisme et sédentarité »
Les racines de ces différents modes de vie remontent au dixième millénaire avant notre ère. Les premières sociétés agricoles se sont établies en Mésopotamie et dans les contreforts de la chaîne des Zagros, tandis qu’en Asie centrale et dans les steppes d’«Eurasie», les animaux étaient le principal moyen de subsistance de l’homme. Entre le 10ème et le 5ème millénaire, un mode de vie sédentaire s’est répandu sur le plateau iranien et la vallée de l’Indus: dans la partie centrale des monts Zagros, des unités monogames ont pu domestiquer des chèvres, cultiver du blé et de l’orge, et faire de la poterie. Ils habitaient des maisons rectangulaires, utilisaient des arceaux pour couvrir les maisons, faisaient des sculptures d’argile en forme d’animaux et créaient des objets artistiques avec des os et des pierres. Les fouilles archéologiques montrent des innovations telles que l’utilisation du silex dans le nord-est de l’Iran (dans les provinces du Golestan et du Nord Khorasan). Bref, le mode de vie des habitants du plateau iranien était devenu sédentaire. Plus tard, les tribus nomades aryennes se sont séparées des autres tribus indo-européennes et sont entrées sur le plateau iranien. Elles se sont sédentarisées à leur tour tout en apportant leur expérience de pastoralisme. A partir de ce moment-là, la vie préurbaine s’est développée dans les différentes régions iraniennes. (Une Histoire des civilisations / Les civilisations de la vallée de l’Indus, de l’Amou Daria et du plateau de l’Iran, pages 287 à 294.
Les premières civilisations de cette terre ont été créées avant que les tribus aryennes ne pénètrent sur le plateau. La civilisation d’Ilam s’est établie avec comme centre Suse à partir du troisième millénaire avant notre ère, puis celle des Achéménides. La civilisation de Jiroft et la celle moins durable de la Shah-é-soukhté « ville brûlée » appartiennent également au troisième millénaire.
Le premier test de « mondialisation »
Nous avons vu que la vie sociale de l’autre côté de l’Amou Daria – en Asie centrale et dans les steppes (Eurasie) a pris une couleur différente. Dans cette région, l’homme cueilleur et chasseur est devenu éleveur de bétail notamment de chevaux et de chameaux et les a utilisés comme moyen de transport. Par ailleurs, leur culture, leur mythologie et leur art étaient complètement différents des celles des communautés sédentaires du plateau iranien.
À partir du cinquième millénaire avant notre ère, la communication entre les deux mondes s’est lentement établie et l’échange de biens, de produits puis de compétences professionnelles s’est développé. Les pierres ornementales, les articles en cuir ou en pierre, la poterie, les matières premières pour la peinture et le bitume faisaient partie des produits échangés entre ces régions très éloignées. Par exemple, les pierres ornementales du Badakhshan ont été découvertes dans la ville de la civilisation sumérienne ** en Mésopotamie au troisième millénaire avant notre ère.
«Sarazm, une ville préhistorique multiculturelle d’Asie centrale près du lieu de naissance de Panjkand / Rudaki
De nouvelles fouilles archéologiques indiquent l’émergence des premières communautés mixtes entre les deux mondes séparés. Un exemple de ceci est une grande zone appelée « Sarazm- » du cinquième au troisième millénaire située dans la vallée de Zar Afshan. Cette vallée possède de nombreuses mines de métaux. Cette société préurbaine avait un système agro-pastoral dans lequel plusieurs cultures vivaient ensemble dans une coexistence pacifique, mais c’est un exemple très rare. Dans les millénaires suivants, l’inimitié entre les deux mondes sera l’esprit dominant des relations.
Fouilles abandonnées de la shar-é- soukhté dans la région de Zabul
Où est notre Iran?
Revenant à la première question de ce texte : Où est l’Iran? Et nous trouvons la réponse dans le livre de l’un des chercheurs les plus éminents de la région, Vassily Berthold: «L’Iran, géographiquement, ne correspond pas à la terre où les Iraniens vivaient en tant qu’unité raciale, ni à la région où l’influence de la civilisation iranienne a été médiatisée. Ni dans celle dans laquelle la langue persane, c’est-à-dire la langue littéraire de l’Iran, était devenue populaire. »« Géographie historique de l’Iran »p. 7 *
Nous demandons: « Alors, où est l’ Iran? » Nizami Ganjavi /poète du XII siècle/ répond que « le monde entier est un seul corps et l’Iran est le cœur! »
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Berthold explique cette affirmation dans l’introduction de son livre. Bref: l’Iran historique ne peut être défini par des frontières politiques, ni par une race particulière, ni même par une civilisation et une langue particulières, l’Iran pour ses habitants, va au-delà de ces mots: l’Iran est dans leur cœur.