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Après la première guerre mondiale ,le Moyen orient s’émerge de milieu des mondes

De Cyrus à Khalifa Abbasside


    Bien que l’idée de régner sur le “monde” existait dans les empires mésopotamiens, c’est Cyrus qui va concrétiser cette idée. « Le monde achéménide « inclura divers groupes ethniques avec différentes langues, cultures et religions. Darius premier  va s’appuyer sur une bureaucratie efficace pour  l’établissement de la domination achéménide, mais il y avait également une culture d’acceptation de «l’autre» dans les sociétés de l’époque, en particulier sur le plateau iranien. Dans l’histoire du peuple juif, il a été question de tribus juives réfugiées sur le plateau iranien après l’oppression des Assyriens. Le récit des tribus perdues, dont certaines sont restées en Iran et d’autres en Asie centrale, remonte à avant la domination achéménide. Le comportement de Cyrus en acceptant la religion et la langue des tribus vaincues était enraciné dans la culture de tolérance des gens de cette époque*.

L’arrivée d’Alexandre le Macédonien en Orient n’a pas renversé cette tradition, et les Grecs narcissiques ont été contraints de respecter la culture de leurs peuples orientaux, et même si les successeurs d’Alexandre avaient leurs propres dieux et parlaient en grec, ils utilisaient la langue des autres religions qui étaient respectées. Cependant, le comportement arrogant** des dirigeants grecs était différent dans les régions adjacentes à leur patrie, et leur l’insolence des Grecs de Méditerranée orientale a fait des Phéniciens et des Juifs des partisans et des alliés des Iraniens. Par ailleurs, pendant la période de l’empereur Titus, les Romains ont pillé le temple juif qui a été construit avec l’aide des Achéménides, et en les prenant comme esclaves, ils ont construit le plus grand amphithéâtre de l’époque (le Colisée) à Rome.

Le traitement de l’Empire romain envers les adeptes du christianisme, dont le nombre augmentait chaque jour dans les “mondes du milieu”, n’était pas plus bienveillant que celui des Juifs : au cours des deux premiers siècles de notre ère, des groupes de chrétiens ont émigré de l’ouest des “mondes du milieu” vers l’est en raison de l’oppression religieuse des Romains et sont devenus des réfugiés dans les terres du territoire sassanide. L’augmentation importante des adeptes du christianisme en Orient et le soutien sans réserve des rois sassanides pour eux étaient considérés comme un grand danger pour l’Empire romain.
Pendant cette période (Shapur II, 1960 et 1970), les routes commerciales de la Chine et de l’Inde vers la Méditerranée orientale étaient sous le contrôle des Sassanides. 

La christianisation de l’empire de Rome:

    Dans le même temps, le climat de l’Eurasie changeait également, ce qui provoqua la migration des Huns des terres du nord de la Chine vers l’Europe et une pression sur les frontières de l’Empire romain. En outre, le paludisme s’est propagée du nord de la mer Noire à l’Europe et a alimenté la panique de la population.  » Routes de la soie p. 69
L’acceptation de la religion du Christ était une solution de l’Empire romain pour réduire les crises sociales. Ces développements ont coïncidé avec l’arrivée au pouvoir des clercs zoroastriens et la suppression des adeptes d’autres religions. Le christianisme, qui a été persécuté par l’empire  romain pendant plusieurs siècles, va dorénavant être utilisé pour consolider le pouvoir de Rome. Lorsque la nouvelle religion a été fermement établie en Europe, le même « comportement narratif » a eu lieu en Europe envers les adeptes d’autres religions, et les adeptes des religions indigènes, manichéens, juifs et autres ont été systématiquement persécutés par les gouverneurs et les peuples.

 Dans ce nouveau contexte , les conflits entre l’Iran et les empires occidentaux (grec et romain) sur la souveraineté  de l’ouest de l’Euphrate à l’est de la Méditerranée et du Caucase et de l’Anatolie, ont pris une couleur religieuse à partir du 3ème siècle après JC. Le facteur de la religion, de l’Arménie à l’Arabie, a eu un rôle plus fort dans les conflits des puissances mondiales à cette époque. En particulier, la migration des chrétiens et des juifs de Syrie et du Liban, vers l’Arabie saoudite et le Yémen. Les tribus de ces régions étaient familières avec les religions abrahamiques et vont fournir le terrain de l’émergence de l’islam. Avec l’intensification de la tension entre les deux empires, le port d’Aqaba et les routes commerciales le long de la mer Rouge en Arabie ont prospéré. Les caravanes ont introduit les tribus arabes dans le monde en dehors du désert d’Arabie.

La propagation de l’Islam dans les premiers siècles de l’Hégire couvrit une grande partie du“ milieu des mondes” et surtout la domination omeyyade changea radicalement  la géographie politique de la région. Muawiyah, qui lui-même est un noble arabe, et dont la famille était fortement opposé au Prophète de l’Islam, établit un nouvel empire à Damas et déplaça ainsi le centre de gravité politique de l’Islam de l’Arabie vers la Méditerranée orientale. En recrutant la bureaucratie de l’Empire romain d’Orient et l’aristocratie chrétienne, il va unifier le “Milieu des Mondes” sous la bannière de l’Islam. Cette fois, la lutte de pouvoir n’était pas entre les empires du plateau iranien et l’Europe, mais entre ces tribus arabes qui étaient les principaux acteurs du pouvoir dans le nouveau monde. Contre les Omeyyades, dont le soutien était en Syrie et Shamat, les chiites des villes militaires de Koufa et Bassorah étendirent leur influence et revendiquent le califat en qualifiant les Omeyyades d’usurpateurs. Bientôt, une longue lutte éclata entre les opposants et la famille omeyyade. Abdullah Ibn Zubair, le petit-fils d’Abou Bakr, le premier calife des musulmans, se proclama calife à Médine et à La Mecque en 683/65 après JC et fit allégeance aux musulmans locaux. Il résista à l’armée omeyyade pendant dix ans jusqu’à ce que, après le siège de La Mecque, la ville fût capturée par les partisans des Omeyyades. Au cours de ces guerres, une partie du bâtiment de la Kaaba fût détruite par une catapulte. 

Le calife omeyyade tenta d’accroître le poids de Shamat (Syrie) en tant que centre de l’islam en construisant une très magnifique mosquée au nom du deuxième calife à Jérusalem . “Le milieu des mondes”*** p.14
Les ennemis des Omeyyades, dont les Iraniens à leur tête, offensés par l’aristocratie arabe, renversèrent l’empire Omeyyade. La capitale fût déplacée de Syrie vers l’Irak et Bagdad fût bâtie avec la coopération des Iraniens. Cette fois, l’expérience de la bureaucratie iranienne était au service des califes abbassides.
Que ce soit pendant le règne des Omeyyades ou pendant les premiers siècles du règne abbasside, les chrétiens de Shamat et les zoroastriens du plateau iranien constituaient la majorité des habitants indigènes. Bien qu’ils soient considérés comme extérieurs à la « Oummah islamique » et qu’ils devaient donc payer la jizya et de lourds impôts, le statut des minorités religieuses est encore bien meilleur que celui des minorités religieuses en l’Europe chrétienne. Ce n’est pas un hasard si les chrétiens d’Orient, appelés plus tard orthodoxes, et les juifs espagnols ont migré vers l’Est.

L’entrée des tribus d’Asie centrale dans le “monde islamique” 

 La pénétration des troupes turques dans les piliers du pouvoir des califes de Bagdad et la grande migration des tribus turkmènes vers l’Anatolie vont ouvrir un nouveau chapitre dans l’histoire du Moyen-Orient. L’invasion arabe et la migration massive des tribus et l’implantation de colonies dans les grandes villes, vont bouleverser le tissu urbain au profit des relations tribales. Les nouvelles tribus n’avaient pas encore été absorbées dans les sociétés d’accueil, lorsque la migration des tribus d’Asie centrale a commencé. Non seulement de nombreuses villes et le système d’approvisionnement en eau et de communication ont été détruits à plusieurs reprises, mais les tribus ont acquis un tel pouvoir que jusqu’au début du siècle actuel, elles étaient considérées comme le principal pilier de l’équilibre des pouvoirs dans la plupart des régions du “milieu des mondes”, un phénomène qui se poursuit aujourd’hui dans des pays comme l’Irak, l’Afghanistan et d’autres pays de la région constituant ainsi un obstacle important à la transformation de ces sociétés.


   

Ottoman et safavide, les maitres du “ milieu des mondes”


L’arrivée et la conversion à l’islam des tribus nouvellement arrivées en Asie centrale, fondent l’empire  ottoman en Anatolie  et l’empire Safavide sur le plateau iranien. Leurs conflits  vont alimenter la nouvelle vague de fanatisme religieux. Les capacités de combat des tribus turques vont être utilisées pour le jihad et la conquête de nouveaux territoires.  L’augmentation des préjugés religieux dans le contexte des relations tribales va provoquer des guerres civiles et une désintégration sociale. Sur le champ de bataille avec les infidèles, la force de travail qui aurait dû être utilisée dans la production sociale, est utilisée dans les  jihad pour  piller la richesse des autres.



L’Empire ottoman safavide est entré sur le terrain dans un tel processus et a divisé la sphère politique de la région. Bien que les deux empires aient commencé l’urbanisation et le commerce et apporté des améliorations dans le domaine  économique, les relations sociales et la structure politique tribale jouaient un rôle décisif contre tout changement. Pendant qu’en Europe, les nouvelles villes commerciales étaient construites  de tous côtés et les sociétés agissaient de jour en jour pour les droits et le progrès, de ce côté du “milieu des monde” les sociétés noyés  dans les traditions tribales étaient incapable de sortir de cette situation.

Cependant, l’Europe persistait toujours dans sa tradition d’intolérance religieuse, et l’église insistait sur l’inquisition et la répression des dissidents malgré les pressions sociales. Bien que la période de la Renaissance et des Lumières ait limité son pouvoir et répandu la tolérance et la coexistence pacifique dans la société, par sa nature dominatrice de l’humanité, cette fois dotée de connaissances et de technologie, l’Europe voulait régner sur les autres mondes. Les croisades étaient terminées, mais le califat ottoman était toujours aux prises avec des rivaux européens. Bien que l’Empire ottoman ait revendiqué la  souveraineté de l’islam sur les infidèles, dès le début de son établissement, le sultan Muhammad Fatih va construire sa structure administrative  sur la base des « nations » et a reconnu l’existence des chrétiens, des juifs et d’autres. 
Mais cette fois, les puissances européennes vont aller au “milieu du monde” non pas sous le prétexte de libérer le lieu de naissance du Christ, mais pour conquérir de nouveaux marchés et pour dominer les routes commerciales. Elles vont profiter de l’indépendance des nations dominées par les Ottomans en les  encourageant à se révolter. L’Empire ottoman, qui se voyait en danger de destruction, tenta de mobiliser les peuples des “mondes du milieu” contre les Européens sous prétexte de défendre les “terres islamiques” contre les infidèles, et utilisa tous ses moyens pour promouvoir le panislamisme afin d’empêcher l’indépendance des nations de la région et de maintenir l’intégrité de son empire. Mais son temps était révolu et le « Milieu des mondes » était condamné à se transformer  en « Moyen-Orient ».

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Bas de page


* La tolérance dans le passé était le résultat spontané de la coexistence de différentes tribus avec des cultures et des langues différentes, alors que dans les sociétés modernes, la tolérance en tant que valeur est le produit de siècles de luttes sociales. Une valeur qui a un soutien juridique et les  administrations  démocratiques (en principe!!) sont chargés d’éduquer et de défendre l’égalité des droits des minorités dans leurs communautés. Il y a une différence fondamentale entre la tolérance d’autrui et la reconnaissance de droits égaux pour autrui. Par conséquent, parler de « tolérance“ et de ”droits de l’homme » dans des sociétés dont la vie collective avait d’autres fondements n’a pas de sens.
** Bien sûr, les Grecs et les Romains n’acceptaient pas facilement les adeptes d’autres religions dans leurs terres natales, tandis qu’au “Milieu des Mondes” les adeptes d’une autre branche du Mithraïsme coexistaient pacifiquement avec les Zoroastriens, les Bouddhistes et les Juifs, et dans des villes comme Suse, Balkh et Boukhara, chacune avait sa propre salle de prière


*** « Khalifa Abd al-Malik fils de Marwan Ier (685 à 705) est à bien des égards le calife omeyyade le plus important. Un peu avant le contrôle de La Mecque, il fît bâtir un magnifique édifice à Jérusalem  appelé « Dôme de rocher ». Divers mots ont été prononcés sur l’importance de ce lieu, les juifs le considèrent comme le lieu de naissance d’Adam, les musulmans le considèrent comme le lieu de naissance du prophète de l’islam et d’Abraham. Selon l’interprétation des juifs, Abraham entendait sacrifier son fils en ce lieu » page 58 du même livre. Le Calife omeyyade entendait faire de cette mosquée un substitut de la Kaaba, car chaque année quand les musulmans de Damas se rendaient à la Kaaba pour le Hajj, Abdullah bin Zubair, le rival du calife, leur fit allégeance. Citation de : Le plus ancien chef-d’œuvre de l’architecture islamique / « Le Dôme du Rocher » du site Web de l’agence de presse Fars

****pourtant  l’empire ottoman n’avait aucune crainte   pour l’asservissement des chrétiens dans le Caucase et les Balkans.

Références